La capitale gabonaise s'est réveillée le mercredi 18 dernier avec une nouvelle "tuerie" en matière de transport. Une vingtaine de tricycles bâche à usage de taxis ont été aperçus, en matinée, aux environs de l'échangeur de IAI, dans le 5e arrondissement de Libreville.
Au guidon de ces engins de couleur vert-jaune lâchés dans le périmètre urbain, de jeunes Gabonais arborant des sourires sans retenue. Si certains Librevillois saluent l'arrivée de ces nouveaux transporteurs nationaux dans un secteur longtemps déficitaire et considéré comme la chasse privée des sujets expatriés, il reste tout aussi important de s'interroger sur la structure en charge de leur gestion.
S'est-elle adressée aux administrations compétentes pour en obtenir toutes les autorisations préalables de mise en circulation ? A-t-elle reçu, par exemple, l'agrément technique délivré par la direction générale des Transports terrestres ? Les conducteurs disposent-ils d'une police d'assurance, de cartes grises, d'une visite technique, etc. ? Sont-ils détenteurs d'un permis de conduire régulièrement délivré par les services compétents ?
Pour tenter de le découvrir, un journaliste de "L'Union" s'est rendu vendredi matin à la mairie du 5e arrondissement, située à un peu plus d'une centaine de mètres du lieu où les engins ont été repérés. Mais ici l'on se veut formel : personne n'a été associée ni de près ni de loin à ce projet. "Nous avons été étonnés comme tout le monde de les voir garer-là, avant de les voir ensuite disparaître", nous a confié un collaborateur du délégué spécial dudit arrondissement.
Réponse identique quelques minutes plus tard, certes avec un petit bémol, à la Banque pour le Commerce et l'Entrepreneuriat pour le Gabon (BCEG). D'autant que si le service Communication reconnaît que cette institution financière dispose de ce type d'engins, dans le cadre de son crédit tricycle mené en partenariat avec Finam Gabon, il explique, en revanche, que l'exploitation par leurs futurs acquéreurs ne sera réservée qu'aux villes de l'intérieur du pays, notamment Mouila et Tchibanga.
En clair, la BCEA ne se reconnaît pas dans ces taxis-motos à trois roues qui se disputent actuellement la clientèle avec les transporteurs traditionnels à Libreville et ses environs. Contacté lui aussi, le directeur général de Tax-Gab+ n'est pas passé par quatre chemins pour "enlever son corps" dans cette initiative. "Je ne suis pas le responsable des tricycles", nous a répondu Curt Myricks Fouty Obeye. Mais qui est alors le promoteur des taxis-tricycles ?
Comment a-t-on pu procéder à la mise en service de ce nouveau type de transport qui, selon un cadre du secteur des Transports, ne serait encadré par aucun texte en République gabonaise ? À la mairie de Libreville où notre reporter s'est également transporté la semaine dernière, cette affaire laisse les autorités plutôt pantoises. Tant celles-ci se demandent comment, dans une société organisée, des individus peuvent se permettre de mettre en circulation des véhicules à usage de transport public au mépris de la législation censée régir ce secteur.
Comme beaucoup d'autres Gabonais, le directeur de cabinet et le directeur des transports affirment que c'est à travers une vidéo postée sur les réseaux sociaux que l'institution municipale a pris connaissance de la mise en service des taxis-tricycles. Aussi, l'Hôtel de Ville de Libreville a-t-il décidé de se saisir de ce dossier. Des contacts pris avec certains conducteurs, il ressort que l'initiateur du projet des tricycles serait un parlementaire de la Transition, le député Gérard Ella Nguema, à travers une structure dénommée "Gabon au travail".
Ce dernier a d'ailleurs été reçu la semaine dernière par la municipalité qui ne demande pas autre chose que de le voir se conformer à la réglementation. Lundi dernier, M. Ella Nguema était à nouveau attendu, finalement en vain, à l'Hôtel de Ville pour produire toute la documentation qui attesterait de la conformité de son projet. Joint mardi au téléphone par L'Union, ce dernier a reconnu être le promoteur des 25 taxis à trois roues.
Il assure que ces véhicules sont couverts "totalement" par une assurance et qu'ils disposent de cartes grises. À la question de savoir si ces moyens roulants ont reçu toutes les autorisations de mise en circulation, notamment de l'Hôtel de Ville de Libreville, Gérard Ella Nguema objecte que "nous sommes en pourparlers avec la mairie. J'y ai même été reçu la semaine dernière".
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