LA HAYE, le 19 mai 2025. La Cour internationale de Justice a rendu ce jour son arrêt sur le fond en l'affaire de la Délimitation terrestre et maritime et souveraineté sur des îles (Gabon/Guinée équatoriale).
Il est rappelé que l'instance a été introduite le 5 mars 2021 par la voie d'un compromis conclu entre le Gabon et la Guinée équatoriale, dans lequel les Parties ont soumis à la Cour un différend concernant la « délimitation de leurs frontières maritime et terrestre communes » et la « souveraineté sur les iles Mbanié, Cocotiers et Conga ».
Dans son arrêt, la Cour observe qu'il ne lui a pas été demandé de délimiter les frontières terrestre et maritime ni de trancher la question de la souveraineté sur les îles Mbanié/Mbañe, Cocotiers/Cocoteros et Conga, mais uniquement de déterminer si les titres juridiques, traités et conventions internationales invoqués par l'une et l'autre des Parties font droit dans leurs relations s'agissant du différend qui les oppose, dont l'objet est défini au paragraphe 1 de l'article premier du compromis. La Cour note que les Parties ont des vues divergentes sur l'interprétation de l'expression « titres juridiques » employée dans cette disposition ainsi que sur l'applicabilité de certains instruments.
En particulier, les Parties sont en désaccord sur le point de savoir si le document intitulé « Convention délimitant les frontières terrestres et maritimes de la Guinée équatoriale et du Gabon » (la « convention de Bata »), invoqué par le Gabon, est un traité faisant droit dans les relations entre les Parties s'agissant du différend en cause. Dans le dispositif de son arrêt, lequel est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour, « LA COUR,
1) Par quatorze voix contre une,
Dit que le document intitulé "Convention délimitant les frontières terrestres et maritimes de la Guinée équatoriale et du Gabon" (la "convention de Bata"), invoqué par la République gabonaise, n'est pas un traité faisant droit dans les relations entre la République gabonaise et la République de Guinée équatoriale et ne constitue pas un titre juridique au sens du paragraphe 1 de l'article premier du compromis ;
POUR : Mme Sebutinde, vice-présidente, faisant fonction de présidente en l'affaire ; M. Iwasawa, président de la Cour ; MM. Tomka, Abraham, Yusuf, Mme Xue, M. Nolte, Mme Charlesworth, MM. Brant, Gómez Robledo, Mme Cleveland, MM. Aurescu, Tladi, juges ; M. Wolfrum, juge ad hoc ;
CONTRE : Mme Pinto, juge ad hoc ;
2) À l'unanimité,
Dit que les titres juridiques invoqués par la République gabonaise et la République de Guinée équatoriale qui font droit dans les relations entre elles s'agissant de la délimitation de leur frontière terrestre commune sont les titres détenus par la République française au 17 août 1960, et par le Royaume d'Espagne au 12 octobre 1968, sur le fondement de la Convention spéciale sur la délimitation des possessions françaises et espagnoles dans l'Afrique occidentale, sur la côte du Sahara et sur la côte du golfe de Guinée, signée à Paris le 27 juin 1900, lesquels titres ont été transmis à la République gabonaise et à la République de Guinée équatoriale, respectivement, par voie de succession ;
3) Par treize voix contre deux,
Dit que, parmi les titres juridiques invoqués par la République gabonaise et la République de Guinée équatoriale, le titre qui fait droit dans les relations entre elles s'agissant de la souveraineté sur les îles Mbanié/Mbañe, Cocotiers/ Cocoteros et Conga est le titre détenu par le Royaume d'Espagne au 12 octobre 1968, qui a été transmis à la République de Guinée équatoriale par voie de succession;
POUR : Mme Sebutinde, vice-présidente, faisant fonction de présidente en l'affaire ; M. Iwasawa, président de la Cour ; MM. Tomka, Abraham, Yusuf, Nolte, Mme Charlesworth, MM. Brant, Gómez Robledo, Mme Cleveland,
MM. Aurescu, Tladi, juges ; M. Wolfrum, juge ad hoc ;
CONTRE : Mme Xue, juge; Mme Pinto, juge ad hoc ;
4) À l'unanimité,
Dit que la Convention spéciale sur la délimitation des possessions françaises et espagnoles dans l'Afrique oc-cidentale, sur la côte du Sahara et sur la côte du golfe de Guinée, signée à Paris le 27 juin 1900, constitue un titre juridique au sens du paragraphe 1 de l'article premier du compromis dans la mesure où elle a établi le point terminal de la frontière terrestre entre la République gabonaise et la République de Guinée équatoriale, lequel sera le point de départ de la frontière maritime délimitant leurs espaces maritimes respectifs ;
5) À l'unanimité,
Dit que la convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 est une convention internationale qui fait droit dans les relations entre la République gabonaise et la République de Guinée équatoriale, au sens du paragraphe 1 de l'article premier du compromis, sagissant de la délimitation de leur frontière maritime.»
M. le juge YUSUF joint à l'arrêt l'exposé de son opinion individuelle ; Mme la juge XUE et M. le juge AURESCU joignent des déclarations à l'arrêt ; M. le juge TLADI joint à l'arrêt l'exposé de son opinion individuelle ; M. le juge ad hoc WOLFRUM joint une déclaration à l'arrêt; Mme la juge ad hoc PINTO joint à l'arrêt l'exposé de son opinion dissidente.
Un résumé de l'arrêt, auquel est annexé un résumé des déclarations et des opinions, figure dans le document intitulé « Résumé 2025/3 ». Ce résumé ainsi que le texte intégral de l'arrêt sont disponibles sur la page de l'affaire sur le site Internet de la Cour. Les communiqués de presse précédents concernant l'affaire sont également disponibles sur le site Internet de la Cour.
Remarque : Les communiqués de presse de la Cour sont établis par son Greffe à des fins d'information uniquement et ne constituent pas des documents officiels.
La Cour internationale de Justice (CIJ) est l'organe judiciaire principal de l'Organisation des Nations Unies (ONU). Elle a été instituée en juin 1945 par la Charte des Nations Unies et a entamé ses activités en avril 1946.
La Cour est composée de 15 juges, élus pour un mandat de neuf ans par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l'ONU. Elle a son siège au Palais de la Paix, à La Haye (Pays-Bas).
La Cour a une double mission, consistant, d'une part, à régler, conformément au droit international, les différends juridiques dont elle est saisie par les Etats et, d'autre part, à donner des avis consultatifs sur les questions juridiques qui lui sont soumises par les organes de l'ONU et les institutions du système des Nations Unies dûment autorisés à le faire.
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