Les établissements scolaires privés laïcs (préprimaire, primaire et secondaire ) poussent comme des champignons à Libreville et à l'intérieur du Gabon.
Ils scolarisent ainsi un important nombre d'élèves et emploieraient près de 18000 personnes toutes catégories confondues, dont 40% de Gabonais. Malgré tout, ces personnels et leurs employeurs ont souvent du mal à accorder leurs violons sur la question de leur statut professionnel et leur rémunération. Notre rencontre avec Me Fulbert Metoghe M'Ossima, le conseiller juridique des personnels de ces écoles privées laïques, permet de mieux apprécier les contours de la situation.
"Ces établissements sont des entreprises qui opèrent dans le domaine de l'éducation. Les personnels sont ainsi régis par le Code du travail au régime du contrat à durée indéterminée (CDI). Lequel les qualifie de travailleurs permanents rémunérés sur l'ensemble des 12 mois civils. Contrairement aux contractuels régis au régime non permanent et à une rémunération correspondant à la durée du contrat", explique le conseiller juridique. La goutte d'eau qui fait déborder le vase vient de ce que, depuis 1985, les enseignants et autres personnels permanents en service dans les établissements privés laïcs sont assujettis par leurs employeurs au régime de rémunération partielle de 9 mois sur la seule période de l'année académique. Comme si cela ne suffisait pas, ces derniers ne seraient immatriculés ni à Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), ni à la Caisse nationale d'assurance maladie et de garantie sociale (Cnamgs).
"Par conséquent, ils n'ont aucun espoir de bénéficier d'une quelconque retraite en fin de carrière ou d'un bonus des services rendus. Ceci dans l'indifférence des ministères de l'Éducation nationale et celui du Travail", dénonce le juriste. En 2018, les salariés des établissements privés laïcs se sont constitués en syndicat, le Syndicat des personnels des écoles privées du Gabon (Speg), pour se faire entendre d'une même voix. "Il s'agissait de plaider sur deux points essentiels : sur des collègues qui totalisent vingt ans de boulot, pour qu' ils aient le droit de pension retraite et pour les actifs, le droit d'être payés sur l'ensemble des 12 mois conformément à la loi du travail ", précise l'un des membres du syndicat. Des revendications qui n'ont nullement préoccupé les différents responsables qui se sont succédé aux ministères de l'Éducation nationale et du Travail du gouvernement déchu.
Pour les promoteurs des établissements, qui se sentent acculés par leurs compatriotes, il ne s'agit pas d'une mauvaise volonté de leur part de refuser l'amélioration des conditions de vie de leurs employés. Ce sont plutôt les difficultés financières auxquelles ils sont confrontés qui les en empêchent. "Vous vous imaginez, nous fonctionnons au fil des mois avec les frais que nous versent les parents pour régulariser la scolarité de leurs enfants. C'est ce qui constitue le budget de la plupart de nos établissements. Et avec le même argent, nous payons les salaires des personnels et supportons toutes les autres charges. Voyez-vous, à l'impossible nul n'est tenu", raconte à L'Union une fondatrice d'école ayant requis l'anonymat.
Mais dans son discours d'ouverture de la 17e commission ministérielle de l'Enseignement privé, les plaignants disent percevoir une lueur d'espoir. D'autant que la ministre de l'Éducation nationale de la Transition, Camélia Ntountoum-Leclercq, a instruit les propriétaires des écoles privées laïques de réfléchir très rapidement sur la rémunération de leurs enseignants sur les douze mois de l'année, ainsi que leur couverture sociale par l'immatriculation à la CNSS et la Cnamgs. Mieux, ils souhaitent que la tutelle matérialise ses instructions aux responsables desdits établissements par un acte administratif qui leur soit opposable (lire ci-dessous).