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Politique

Alexandre Barro Chambrier : "2025 sera une année charnière…"

Alexandre Barro Chambrier. © DR

Alexandre Barro Chambrier dresse son bilan après un an. © DR

L'Union : Cela fait un an que vous êtes à la tête du ministère de la Planification et de la Prospective. Qu'avez-vous fait pour mettre cette administration sur les rails ?

Alexandre Barro Chambrier : Nous nous sommes attelés à reconstruire l'architecture opérationnelle du ministère en formant des équipes compétentes, consolidant l'armature juridique et collaborant avec les autres départements ministériels pour doter le ministère des moyens nécessaires. Le ministère a ainsi intégré des structures essentielles issues d’autres départements, comme la Direction générale de la statistique, la Direction de la prospective et la Direction de l'aménagement du territoire. La création du Commissariat général au plan s’ajoute à cette dynamique. Ces actions visent à renforcer les capacités du ministère et repositionner son rôle stratégique dans le développement du Gabon.

Pouvez-vous citer quelques actions concrètes ?

- Parmi les réalisations majeures, on note la finalisation du Plan national de développement pour la Transition (PNDT), un outil central de planification qui intègre les perspectives économiques, sociales et environnementales du pays. Le ministère conduit également la finalisation du Recensement général de la population et des logements (RGPL) et de l’Étude nationale prospective " Gabon 2050 ", qui définira la vision de notre développement pour les 25 prochaines années. Un projet de politique nationale d’aménagement du territoire sera prochainement soumis à l’adoption en Conseil des ministres, et une planification glissante triennale a été mise en place pour garantir la cohérence des actions de développement.

Votre département est censé gérer le budget d’investissement du pays. Cela n’a pas toujours été vu d’un bon œil par certains de vos collègues. La sérénité est-elle désormais de mise ?

- Le budget d’investissement est un levier essentiel pour impulser le développement économique et social du Gabon. Sa préparation nécessite une coordination efficace et une transparence accrue. Aujourd’hui, grâce à un dialogue ouvert et constructif avec les ministères sectoriels, nous avons su instaurer un climat de confiance propice à une collaboration harmonieuse. Les résistances initiales ont progressivement cédé la place à une synergie collective visant à optimiser l’allocation des ressources vers des projets véritablement structurants. Le Plan national de développement pour la Transition (PNDT) joue ici un rôle fondamental. La question n’est plus de gérer le budget d’investissement de manière isolée, mais de veiller à sa bonne exécution à travers une chaîne de dépenses rigoureusement liée aux projets de développement en cours. Le ministère de la Planification assure pleinement ses missions de conception, de suivi et d’évaluation de ces investissements dans le cadre de la chaîne " Planification-Programmation-Budgétisation-Suivi-Évaluation ".

L’Exécutif a lancé de nombreux chantiers sur le territoire national. Aujourd’hui, plusieurs sont à l’arrêt. D’aucuns évoquent des tensions de trésorerie. Est-ce à dire que la programmation desdits chantiers n’a pas été bien étudiée ?

- Il est essentiel de contextualiser la situation actuelle pour une meilleure compréhension. Nous avons hérité d'une situation économique dégradée, marquée par un endettement très élevé qui limite considérablement nos marges de manœuvre budgétaires. Les choix d'investissement réalisés jadis n'ont pas toujours permis de maximiser l'effet multiplicateur sur la croissance, ce qui a conduit à une diminution de l’investissement public. Ce contexte, combiné à une transition politique délicate, a inévitablement affecté notre capacité à mobiliser des ressources extérieures. Malgré ces contraintes, le gouvernement, depuis la prise de pouvoir du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), a su honorer ses engagements. Nous avons veillé à garantir le paiement régulier des salaires et à mettre en œuvre des mesures sociales significatives, telles que le rétablissement des bourses scolaires et le règlement des rappels de solde. Ces actions témoignent de notre engagement à répondre aux besoins des populations, même dans un contexte budgétaire difficile. Nous avons pleinement conscience que certains projets ont pris du retard. Toutefois, il est crucial de souligner que cela résulte principalement de contraintes financières externes et de la nécessité d’observer une certaine stabilité budgétaire. Nous avons déjà engagé une réévaluation de nos priorités, ajustant les calendriers d’exécution en fonction des ressources disponibles. Parallèlement, nous avons renforcé la coordination intersectorielle pour garantir la cohérence et la continuité des projets. Tout cela devrait permettre une reprise de ces projets dans un avenir proche.

Votre ministère est en charge de l’exécution du Plan national de développement pour la Transition (PNDT) et du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC). Quid de l’effectivité et du financement ?

- Ces deux programmes sont déjà en cours de réalisation. Nombreux de leurs projets ont fait l’objet d’inscription dans les lois de finances 2024 et 2025. S’agissant précisément du PUDC, qui bénéficie d’un accompagnement du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), une inscription budgétaire de dix (10) milliards de FCFA a été retenue au titre de l’année 2025. Cette inscription budgétaire est destinée au financement des projets à fort impact social dans les zones rurales. Notamment dans les secteurs de l’eau, de l’électricité, des routes, de l’agriculture, de l’éducation et en faveur des activités génératrices de revenus. Leur financement dépend d’une gestion efficiente des ressources internes et de l’apport des partenaires techniques et financiers. La réussite de ces programmes repose sur une gouvernance transparente, un suivi rigoureux et l’implication citoyenne à travers des consultations régulières. Dans le cadre du PNDT, une enveloppe de 20 milliards de FCFA a été consacrée en 2024 aux projets à vocation sociale tels les projets en phase d’achèvement notamment le projet de construction, réhabilitation et équipement des lycées de Bikelé, Paul Kouya de Koula-Moutou, et du Lycée Technique National Omar Bongo. En 2024, près de 300 milliards de FCFA ont été consacrés aux équipements et infrastructures de Transport, notamment les voiries du Grand Libreville et des huit autres provinces du pays ; la réhabilitation et la construction des tronçons Bifoun-Ndjolé, Ntoum-Cocobeach, Sibang-Bambouchine, la poursuite des travaux Moanda-Bakoumba, Forasol-Mbega, Ndendé-Tchibanga et l’aménagement de la voie de contournement d’Oyem.

En quoi le PNDT et le PUDC diffèrent des précédents plans tels que le PSGE, le PRE ou le PAT ?

- Le PNDT et le PUDC se distinguent des précédents plans par leur approche inclusive, participative et axée sur des résultats concrets. Contrairement aux anciens programmes, souvent entravés par des financements insuffisants et une exécution incertaine, ces initiatives répondent aux besoins réels des populations, notamment rurales et vulnérables, avec des objectifs mesurables à court et moyen termes. Leur conception repose sur une planification flexible, garantissant un financement sécurisé et une mise en œuvre efficace, tout en intégrant des solutions durables face aux défis climatiques et économiques mondiaux. Des mécanismes de suivi et d’évaluation rigoureux sont mis en place pour garantir la transparence et l’efficacité des actions, favorisant une répartition équitable des ressources et le développement des territoires moins favorisés. les anciens plans comme le PSGE, le PRE et le PAT, dont l’horizon de réalisation était 2025, ne sont plus en vigueur.

Parmi vos chantiers figurent le Recensement général de la population et des logements (RGPL), l’Étude nationale prospective " Gabon 2050 " et le Plan d’aménagement du territoire. Un mot sur leur mise en œuvre ?

- Nous travaillons d’arrache-pied à la finalisation du RGPL qui marquera une étape clé dans la consolidation des bases statistiques du Gabon. Ce recensement permettra d’avoir une cartographie précise de la répartition démographique, d’évaluer les besoins en logements et en services publics, et d’anticiper la planification des infrastructures indispensables pour accompagner la croissance du pays. Parallèlement, l’Étude nationale prospective " Gabon 2050 " progresse activement grâce à la mobilisation des parties prenantes. Cet exercice prospectif vise à identifier les grandes tendances économiques, sociales et environnementales à long terme, afin de concevoir des stratégies adaptées aux futurs défis du pays. En lieu et place du Plan d’aménagement du territoire, vous vouliez certainement parler de la Politique nationale d’aménagement du territoire (PNAT) qui est en cours de validation. Ce cadre stratégique vise à structurer de manière équilibrée le développement spatial du Gabon, en conciliant urbanisation maîtrisée, gestion durable des ressources naturelles et adaptation aux changements climatiques. Ces projets constituent les fondations d’une planification cohérente et durable, essentielle pour guider le développement du Gabon pour les 25 prochaines années.

Lors de sa dernière adresse à la Nation, le président de la Transition a annoncé le lancement cette année des travaux de construction du chemin de fer Bélinga-Booué-Mayumba, du barrage hydroélectrique de Booué et du port en eau profonde de Mayumba. Ces projets sont-ils réalisables à court terme au regard du niveau d’endettement du pays ?

- Ces trois projets structurants répondent à l’impératif d'exploitation de la mine de Belinga, nécessitant des infrastructures majeures pour stimuler le développement. Le chemin de fer reliant Belinga à Mayumba, via Booué et Lastoursville, facilitera l’évacuation du minerai et d’autres ressources. Le port en eau profonde de Mayumba vise à devenir un hub logistique sous-régional, tandis que le barrage hydroélectrique de Booué doublera les capacités énergétiques du pays, assurant l’approvisionnement énergétique nécessaire à l’industrialisation et aux ménages pour les vingt prochaines années. Dans ces conditions, les instructions du chef de l’État doivent être mises en œuvre en tenant compte des chronogrammes techniques de chaque projet. Il s’agit de les mettre en œuvre graduellement en fonction de leurs spécificités. Ainsi pour le lancement de ces projets, 2025 sera une année charnière qui verra s’accélérer la réalisation des études, l’intensification du dialogue avec les potentiels investisseurs et, par la suite, le début des travaux. Pour ce qui est du finance- ment, nous sommes pleinement conscients des défis que représente le niveau d’endettement du pays. C’est pourquoi nous privilégions des solutions de financement innovantes, telles que les partenariats public-privé (PPP) et des collaborations avec des bailleurs de fonds internationaux. Nous avons déjà engagé des discussions constructives pour garantir la viabilité financière de ces projets tout en préservant la stabilité de notre dette publique.

Quel rôle joue votre département dans la gestion de ces projets d’envergure ?

- Le rôle de notre ministère est central dans la coordination des projets structurants. Nous assurons que ces initiatives s’intègrent dans une approche de développement global, où chaque projet contribue à la fois à l’épanouissement économique, social et environnemental du pays. En charge de la préparation des projets et programmes de développement, notamment par la réalisation des études de faisabilité technique, économique et environnementale, le ministère de la Planification prendra bien entendu toute sa place dans la mise en œuvre de ces grands projets. Nous nous engageons à garantir que chaque projet apporte une valeur durable aux populations et au pays, à travers un suivi-évaluation rigoureux. Le ministère met en œuvre des stratégies visant à aligner les objectifs principaux de ces projets aux objectifs de développement de long terme du pays.

Le Parlement vient de plancher sur le Code électoral. Que pense le président du Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM) ? Cette révision était-elle indispensable ? Ne suffisait-il pas simplement d’abroger certaines dispositions comme le bulletin unique, etc. ?

- La révision du Code électoral s’inscrit comme une nécessité dans le contexte actuel pour renforcer la démocratie et améliorer la transparence du processus électoral. Vous vous souvenez certainement que lors des dernières élections générales, les règles du jeu démocratique avaient été modifiées à la discrétion de l’ancien régime, sans consultation des acteurs politiques impliqués. Cette réforme ne se limite pas à la suppression de certaines dispositions, mais vise à renforcer la confiance des citoyens et de la communauté internationale dans nos institutions. Il ne s’agit pas seulement de simplifier le processus, mais d'aborder des enjeux fondamentaux tels que la représentativité, la parité et la transparence des élections. Ces mesures sont cruciales pour garantir des élections libres et crédibles, garantes d’un système politique juste. Cependant, il est essentiel de rappeler qu’un Code électoral parfait ne suffira pas à lui seul sans un véritable changement de mentalité de la part de tous.

Certains confrères annoncent l’adhésion au RPM, dans un proche avenir, de René Ndeme-zo'Obiang. Qu’en dites-vous ?

- Je respecte profondément le parcours et les choix politiques de chaque individu. Si M. René Ndemezo'Obiang choisit de rejoindre le RPM, cela démontrera la dynamique d’ouverture et d’inclusivité qui caractérise notre Parti. Le RPM est un parti de rassemblement, un espace propice au dialogue, à l’unité et à la construction. Cependant, l’adhésion au RPM suit des processus et des procédures rigoureuses, où la base militante joue un rôle central dans la prise de décision. À ce stade, il est donc prématuré de parler d’adhésion formelle. Nous pouvons simplement noter que le processus est en cours et qu’il reste ouvert à toutes les dynamiques positives qui servent notre vision commune.

C’est acté par la Charte de la Transition, vous ne serez pas candidat à la présidentielle à venir. Comment vivez-vous cette " discrimination " ?

- La décision de ne pas être candidat est un acte de responsabilité et de respect envers les engagements que j’ai pris dans le cadre de la Charte de la Transition. Je ne considère pas cette décision comme une forme de discrimination, mais plutôt comme une opportunité de concentrer toute mon énergie et mes efforts à mener à bien les réformes nécessaires et à accompagner le Chef de l’État dans ses projets pour le Gabon. Vous semblez utiliser un terme trop fort en parlant de discrimination. En réalité, être candidat n’est pas une finalité en soi. En acceptant d’être en charge de la Planification et de la Prospective, j’en mesurais pleinement les conséquences. Je m’inscris pleinement dans les ac- tions entreprises par le Chef de l’État et dans cette étape de ma vie où il est essentiel d’apporter mon expertise, de transmettre des compétences et d’encadrer la relève. C’est un rôle que je considère comme déterminant pour l’avenir du Gabon…

… Est-ce à dire que toute ambition présidentielle est bannie au RPM ?

- Le RPM ne se résume pas à ma personne. Nous disposons de ressources humaines de haute qualité, capables de répondre efficacement aux divers défis auxquels notre pays fait face. Il est essentiel de tenir nos engagements. L’objectif de tout parti politique reste d’accéder aux fonctions les plus hautes. Le RPM est un parti ouvert et dynamique, qui met en avant les talents et les ambitions de ses membres. Cependant, nous traversons une période particulière de Transition, et notre priorité actuelle est de réussir cette étape cruciale pour le pays. La question d’une ambition présidentielle pour l’avenir n’est donc pas à l’ordre du jour.

Votre mot de fin ?

- Le Gabon est en marche vers un développement durable et inclusif. Notre ministère reste pleinement déterminé à concrétiser les ambitions du pays avec rigueur, transparence et efficacité. Nous devons privilégier les cadres de concertation pour une meilleure appropriation des nécessaires réformes. La situation actuelle, bien que complexe, offre une véritable chance de réinventer le Gabon. Nous sommes à un tournant décisif, où les choix que nous faisons aujourd’hui détermineront l’avenir de notre pays. Le ministère dont j’ai la charge est pleinement engagé dans cette Transition, en travaillant à la mise en place de politiques de développement à long terme, tout en assurant la stabilité économique et sociale. La planification stratégique et la prospective ne sont pas des outils abstraits, mais des leviers concrets pour répondre aux attentes des Gabonais. Il existe des moments où il est nécessaire de privilégier la participation constructive. Nous avons la conviction qu’en unissant nos forces, nous pourrons bâtir un Gabon plus prospère, plus inclusif et plus résilient face aux défis mondiaux.

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