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Société & Culture

Camélia Ntoutoume-Leclercq  : "Les violences en milieu scolaire sont un phénomène qui déstabilise profondément l'école""

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En l’espace de deux mois, soit moins de temps qu'il n'en faut pour boucler le premier trimestre de l’année en cours, ce sont trois cas graves de violences scolaires répertoriés sur l’ensemble du territoire national. Face à la montée de ce fléau au sein de la communauté éducative, la ministre de l’Éducation nationale, Camélia Ntoutoume-Leclercq, promet d’intensifier les campagnes de sensibilisation, tout en rappelant la nécessité de sanctionner les fautifs.

L’Union : Madame le ministre, le phénomène des violences en milieu scolaire va grandissant. Quels mécanismes envisagez-vous pour en venir à bout ?

Camélia Ntoutoume-Leclercq : " Le phénomène de violences en milieu scolaire transcende le milieu scolaire qui hérite de la montée sociale du phénomène de violences. Ainsi mon département ministériel envisage-t-il un renforcement des partenariats multisectoriels et multidisciplinaires visant à une prévention effective, un accompagnement personnalisé, mais également au respect des normes répressives. La prévention reste nécessaire car le phénomène, il faut le relativiser sans en minimiser l’ampleur, ne se manifeste pas de manière égale dans le système éducatif. Par conséquent, le renforcement du dispositif de sécurité au sein et aux alentours de nos établissements scolaires, l’harmonisation des règlements intérieurs, l’implication des élèves pour des actions de communication à l’endroit de leurs pairs… constituent des approches de riposte privilégiée. De plus, une participation efficiente des parties prenantes passant par le renforcement des compétences opérationnelles des acteurs, la poursuite de la formation des acteurs de l’éducation sur la problématique des violences en milieu scolaire (responsables d’établissements, enseignants, personnels spécialisés, conseillers d’orientation psychologues, travailleurs sociaux, personnel médical, censeurs de la vie scolaire, agents de sécurité) permettra de renforcer la disponibilité de l’information pour un changement de comportement et un accompagnement individualisé des victimes voire des auteurs. " En outre, la prévention est la réponse efficace aux actes de violence en milieu scolaire invitant à s’arrimer aux dispositifs multisectoriels de protection de l’enfance, nous nous attelons à renforcer les contenus des curricula des apprenants et de formation des enseignants, les cadres stratégiques et réglementaires afin d’intégrer les principes, les procédures et les outils de signalement, de référencement et de prise en charge, en collaboration avec les autres secteurs concernés par la protection de l’enfant. Cependant, les sanctions seront également appliquées avec la plus grande fermeté. Toutes ces dispositions seront traduites dans un cadre d’intervention stratégique qui sera rendu disponible dans un proche avenir.

Ne croyez-vous pas que la phase de sensibilisation a montré ses limites au vu de la recrudescence du phénomène ?

" La sensibilisation est et reste une stratégie incontournable dans la recherche de l’adoption des comportements à moindre risque chez les apprenants et les différents acteurs éducatifs. Cependant, le changement de comportement exige un temps d’adaptation par les cibles. Pour y parvenir, il est nécessaire que chaque partie prenante, quel que soit le secteur, contribue au renforcement des connaissances à travers une stratégie de communication permanente et ciblée. Tous les acteurs sociaux doivent cerner les facteurs favorisants et les différents impacts afin que les informations diffusées soient harmonisées. Ainsi, ce qui est déjà fait continuera à être consolidé car l’information reste l’une des clés de la réussite de la lutte contre la problématique de la violence en milieu scolaire et nous savons compter avec les différents partenaires au développement qui ne ménagent aucun effort pour nous accompagner dans le processus d’assainissement du paysage éducatif.

Les partenaires sociaux et religieux semblent se joindre à la lutte, que pouvez-vous attendre d’eux ?

"Les partenaires sociaux et religieux contribuent déjà de manière efficiente à la lutte. Ils nous accompagnent inlassablement dans ce combat qui nécessite la réelle participation de toutes les couches de la société. Leur participation est appréciée et nous profitons de cette tribune pour leur adresser nos remerciements en affirmant que nous comptons sur leur disponibilité afin de renforcer la riposte à la violence en milieu scolaire. De nombreux apprenants fréquentent en effet les différentes structures religieuses et la dissémination d’informations sur la paix, la culture de la non-violence, la tolérance, l’amour du prochain, la maîtrise de soi… dans ces différents lieux de culte reste incontournable dans l’instauration d’un monde non violent.

N’avez-vous pas prévu d'associer les forces de l’ordre, peut-être pour plus d’efficacité ?

"Depuis quelques années, le ministère dont j’ai la charge est en partenariat avec les différentes Forces de défense et de sécurité, notamment les Forces de police nationale (FPN), dans le cadre de la sécurisation des établissements. Les anciens policiers, identifiés et dont les capacités ont été renforcées par les services techniques en tant qu’agents de sécurité scolaire, ont permis de renforcer la stratégie de fouille systématique, entre autres. De plus, l’ambition de notre département ministériel est d’accentuer cette collaboration avec les autres forces pour des actions de prévention et de répression tout en respectant les normes qui régissent le fonctionnement du milieu scolaire.

Votre mot de fin…

"Les violences en milieu scolaire sont un phénomène qui déstabilise profondément l'école, étant donné qu'il s'agit de régler non pas des problèmes scolaires proprement dits mais des problèmes psychologiques et sociaux. Elles sont devenues un "phénomène de société" en lien avec la montée des violences urbaines qui empruntent plusieurs formes, s’expriment dans différents contextes et entraînent des conséquences variables sur le bien-être des apprenants. " La lutte contre ce fléau nécessite ainsi l’implication de l’ensemble des parties prenantes dont la famille qui est le premier lieu de socialisation de l’enfant. Le ministère dont j'ai la charge ne réussira pas à relever ce défi social sans la contribution effective de tous. J’invite ainsi l’ensemble des parties prenantes à la mutualisation des efforts et à la conjugaison des énergies pour des actions renforcées. Ce n’est qu’à ce prix que nous réaliserons la vision du président de la République, Ali Bongo Ondimba, qui n’a de cesse de souligner le caractère prioritaire de la jeunesse gabonaise, dans les politiques et programmes de développement du pays : une jeunesse bien formée, en bonne santé mentale et physique."

Propos recueillis par Hans NDONG MEBALE

Libreville/Gabon

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