OPINION / Bouillons industriels en cubes : consommation à risque

Les experts constatent une recrudescence inquiétante et permanente de certaines pathologies en Afrique, et plus particulièrement au Gabon. Parmi les facteurs déterminants, on note un déficit de sensibilisation et de prévention en milieu familial et scolaire, la sédentarité et, surtout, des habitudes alimentaires déséquilibrées.

Dans notre pays, la gastronomie repose largement sur l'utilisation des bouillons industriels de cubes comme exhausteurs de goût, visant à sublimer les saveurs et à structurer l’aromatique des mets confectionnés dans les différents lieux de cuisson (cuisine familiale, restaurant de l’hôtel, restaurant normal, prestataire de mariage, " cafétéria"…).

Toutefois, ces produits contiennent une forte concentration de sel. Souvent lors de la cuisson, on complète généralement par un ajout supplémentaire de sel alimentaire. Ce qui fait une très forte quantité de sel. Cette manière de cuisiner, avec une accumulation excessive de sel, permet d’obtenir un plat savoureux et appétissant et augmente l'intensité de la perception olfacto-gustative, masquant pourtant des risques sanitaires non négligeables.

En effet, les bouillons industriels en forme de cubes sont composés majoritairement de sel, avec une teneur avoisinant les 40 à 50 %. Il est donc impératif de ne pas surcharger nos préparations en sel lorsque ces ingrédients sont utilisés, sous peine de dépasser largement les seuils recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui préconise une consommation inférieure à 5 grammes de sel par jour et par adulte, soit environ une cuillère à café.

Les spécialistes de la nutrition et de la santé publique sont unanimes : une consommation excessive de sel entraîne des pathologies chroniques graves telles que les maladies cardiovasculaires, l’hypertension artérielle et les accidents vasculaires cérébraux (AVC). De même, un apport excessif en sel favorise l’excrétion du calcium via l’urine, augmentant ainsi le risque d’ostéoporose, notamment chez les femmes.

Il convient toutefois de souligner que le sel, en particulier le sel iodé, demeure essentiel à certaines fonctions biologiques. L’iode est indispensable au bon fonctionnement de la glande thyroïde qui, en cas de carence, peut développer un goitre et voir son activité hormonale altérée. Ces hormones jouent un rôle clé dans la régulation thermique du corps, le métabolisme énergétique et le développement des organes.

À cet égard, il est recommandé de privilégier un sel enrichi en iode afin de prévenir les déficits nutritionnels liés à cet oligoélément. Face à cette réalité préoccupante, il devient urgent de sensibiliser les consommateurs gabonais aux dangers liés à une consommation excessive de sel et de bouillons industriels enrichis sous forme de cubes. La mise en place des campagnes de prévention, visant à informer sur la composition des bouillons industriels en cubes et leurs effets néfastes sur la santé et l’adoption d’alternatives culinaires plus saines et équilibrées font partie de ces campagnes.

Par ailleurs, il est impératif que les organismes spécialisés et compétents, bras séculier de l’État en matière de sécurité sanitaire des aliments, renforcent leurs dispositifs de contrôle et de régulation des sels alimentaires importés dans notre pays. Une vigilance qualitative et quantitative accrue de ces derniers lors des importations s’avère indispensable, car le simple contrôle documentaire d’importation ne garantit pas la conformité aux normes de santé publique et la dangerosité de ces additifs alimentaires.

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Par : Eris Séraphin NDJIBILA, Ingénieur agroalimentaire, spécialisé des technologies des produits alimentaires